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150 – Ida et Éva font de beaux mariages : IDA

IDA (les enfants de Mary-Ann 1)

Le curé Gosselin trouve un mari à Ida et à Éva. Comme on l’a vu au chapitre 149, Mary-Ann O’Neill et François-Régis Gosselin n’eurent d’autre choix que d’accepter d’être hébergés chez David Gosselin, le frère de Francois-Régis, après la déconfiture professionnelle et sociale de François-Régis à Chicoutimi en 1885. Le curé Gosselin, dominant et autoritaire, allait prendre en main le sort de ses neveux et nièces mais avec un succès inégal, on le verra. S’agissant d’Ida et d’Éva, il n’eut aucune difficulté à atteindre l’objectif qu’il s’était fixé : leur trouver à chacune un mari. On disait dans la famille que c’est le curé Gosselin qui avait favorisé ces unions. Je n’ai aucune difficulté à le croire.

L’une et l’autre se marieront en 1872. Au cours des années elles feront l’unanimité par leur grâce, leur gentillesse et leur éducation impeccable… même si elles n’ont aucun argent de famille, aucune dote et un modeste trousseau de mariage.

Ida épouse un Savard de Chicoutimi. Le 24 mai 1892, Ida épouse Louis-Joseph Savard, fils d’une famille à l’aise de Chicoutimi et qui s’est installé temporairement à Québec parce qu’il vient d’investir dans l’acquisition d’une manufacture de chaussures. Dans l’acte de mariage, célébré à Saint-Roch, la mariée est identifiée comme « Mary-Jane » (le prénom de la marraine de sa mère, Mary-Jane Cary mariée à Laurence Ambrose Cannon). On indique qu’elle est résidente de la paroisse de Saint-Roch, ce qui est exact puisqu’Ida ainsi que son frère Edwin vivent chez leur oncle Pierre Gosselin. On mentionne que ses parents habitent Cap-Santé. C’est l’oncle David Gosselin qui, s’étant déplacé de Cap-Santé, procède à la cérémonie.

Une famille qui porte haut. Louis-Joseph (1872-1948) a deux ans de moins qu’Ida et est d’un tempérament insouciant. Il adore la chasse et la pêche et tâte des affaires mais sans grand succès. La famille Savard « porte haut ». Le père de Louis-Joseph, Edmond Savard, originaire de La Malbaie, est propriétaire d’un magasin général. Il s’est lié avec la famille Price, qui fait le commerce du bois. Les affaires roulent bien. Aussi Louis-Joseph se laisse-t-il porter par la vague et profite de la vie. L’usine de chaussures qu’il avait acquise fait faillite et le chantier de coupe de bois qu’il a acquis sur la Côte Nord périclite. Mais la faconde demeure intacte.

La mère de Louis-Joseph, Flavie née Racine, est d’un caractère dominant. Elle n’est pas peu fière d’être la nièce de Mgr Antoine Racine, évêque de Sherbrooke, et de Mgr Dominique Racine, évêque de Chicoutimi et affiche ses convictions religieuses avec orgueil. Le genre de filiation qui plaît sûrement énormément au curé Gosselin! Flavie tient la famille sous sa coupe et n’aura aucun problème à imposer son autorité sur sa bru, Ida, timide et réservée. Celle-ci n’arrivera jamais à s’imposer auprès de sa belle-mère.

15001aVoilà la famille à laquelle Ida, décrite comme douce et peu vindicative, a lié son destin. Une famille terrienne, éprise d’horticulture, de chasse, de pêche, bref de cette nature sauvage et indomptée que l’on trouve à portée de vue dans la région de Chicoutimi.

Louis-Joseph fait construire une belle et vaste demeure, rue Racine, et le couple s’y installe. Cinq enfants naîtront de cette union : Blanche (1893), Paul (1898), Roger (1901), Françoise (1903) et Félix-Antoine (1896) qui deviendra écrivain. Mais Ida décédera le 26 mars 1927, alors qu’elle n’a que 57 ans.

Félix-Antoine, un mémorialiste peu fiable. Le fils préféré d’Ida, l’écrivain Félix-Antoine Savard, décrira avec force détails dans ses mémoires la famille Savard, ne se gênant pas pour embellir ses origines et, en corollaire, envoyer sous le tapis les épisodes peu reluisants de l’histoire des Savard. (Journal et Souvenirs, Montréal, Fides, 1973 et Carnets du soir intérieur, Montréal, Fides, 1979). Un trait de caractère qui n’échappera pas à ses biographes. Disons que l’humilité n’était pas une vertu que Félix-Antoine pratiquait! Mais il aimait sincèrement et tendrement sa mère ainsi que ses frères et surtout ses sœurs, Blanche et Françoise.

Félix-Antoine coiffera son grand-père, Roger Savard, d’une auréole sans doute méritée. Il s’agit surtout pour l’écrivain de nous amener à croire qu’il s’agit là des débuts d’une dynastie dont il est lui-même l’héritier. Il ne lésine pas sur l’enflure! Mais il passera sous silence les déboires financiers de son propre père et surtout ceux de son beau-frère, Pierre Vézina, marié à Blanche Savard. Le couple Vézina-Savard en sera réduit à quitter Chicoutimi et à s’installer chez Félix-Antoine, qui vient d’être nommé curé à Clermont, près de La Malbaie. Comme François-Régis et Mary-Ann chez le curé Gosselin des années auparavant!

Ferdinand Verret éclaire notre lanterne. C’est Ferdinand Verret qui dans son Journal lèvera le voile sur les déboires de Pierre Vézina. Ferdinand effectue en 1934 un voyage à La Malbaie en compagnie de Lucie Bédard, sa femme. Il a convié ma grand-mère Lizzie et le mari de celle-ci, mon grand-père Joseph-Arthur Bédard, à les accompagner. Lizzie en profite pour rendre visite à Blanche, la fille d’Ida, qui est de ce fait sa nièce :

« Aux chutes Naird on entra au presbytère où la sœur du curé, Antoine Savard, absent, est la ménagère. C’est la nièce de Lizzie. Une fort jolie et gentille personne dont le mari, Pierre Vézina, ancien maire de Chicoutimi et qui y habitait un château et y menait la vie sur un haut tempo, se vit réduit à la pauvreté complète. Le pauvre diable, malade, est heureux d’avoir un abri chez le pauvre curé. Sa femme, Blanche, prend assez bien les choses et sait aussi bien se tirer d’affaire sans le sou, comme aux jours où l’argent ne comptait pas. Quant au mari Vézina, 47 ans, c’est un homme fini, sans influence, sans ami. » (Journal de Ferdinand Verret, 21, 22 et 23 août 1934).

15002Ne cherchez pas de référence à cet épisode dans les mémoires de l’écrivain!

Le remariage de Louis-Joseph fait scandale dans la famille. De même, la famille Savard et surtout Félix-Antoine tairont le fait que Louis-Joseph Savard s’était remarié le 29 juin 1932 avec Rosanne Potvin, âgée alors de vingt-sept ans. La jeune femme travaillait comme ménagère au presbytère de Clermont, paroisse dont Félix-Antoine était le curé! C’est là que Louis-Joseph avait fait sa connaissance, à la faveur d’une visite à son fils, Félix-Antoine! De ce mariage naîtront trois enfants. L’histoire avait fait les délices des potineurs du coin. Pour le plus grand déplaisir de la famille Savard, qui n’acceptait pas une telle mésalliance qui s’ajoutait aux déboires du mari de Blanche. Rosanne décédera le 8 mai 1980, deux ans avant son beau-fils et des années après le décès de son mari, mort en 1948.

Ida fut-elle heureuse? On peut en douter. Entre une belle-mère exigeante, un mari souvent absent, qui adorait plus que tout partir à la chasse et à la pêche, la laissant seule avec les enfants, loin de ses sœurs Éva et Lizzie, elle ne semble pas s’être beaucoup épanouie, comme en témoigne cette photo, prise peu de temps avant sa mort, le 26 mars 1927, alors qu’elle n’avait que 57 ans.

151 - Ida et Éva font de beaux mariages : ÉVA

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