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65 – L’épopée d’Isaac Bédard, la version de ses descendants américains

6503Surtout ne pas oublier. Le Bédard constitue une source inépuisable d’informations diverses, sur les mariages, décès, et autres événements de vie des nombreux descendants. La liste des anniversaires échelonnée sur les douze mois de l’année est impressionnante. On reproduit également les enregistrements de conversations récentes ou du moins contemporaines où les descendants d’Alphonse et d’Euphémie se remémorent des anecdotes que leurs parents ou grands-parents leur racontaient. Il ne semble pas certain qu’Alphonse ait informé ses enfants restés à Argyle de son remariage avec Euphémie, à en juger par certains commentaires échangés entre certains de ses descendants. Il se serait écoulé du temps avant que la nouvelle ne parvienne au Minnesota. Comment disposer de cette information? Est-ce parce que finalement on ne se fréquentait pas si assidûment que cela, entre Charlesbourg et Argyle? Pour ceux établis à Argyle, l’empressement avec lequel Alphonse s’était remarié était-il jugé trop hâtif?

Globalement, le bulletin des Bédard du Minnesota est un petit bijou. Parce qu’il n’est pas censuré, « édité », il explose de spontanéité. On y passe de l’anglais au français, ce français approximatif de ceux qui l’ont vaguement entendu parler quand ils étaient jeunes, quand ce n’est pas carrément le français de la traduction automatique de logiciel, avec son cortège d’erreurs grammaticales! Mais c’est ce qui fait l’authenticité de cette publication. Aucune prétention. Mais la recherche de ses racines, avec ce désir de ne pas perdre la trace de ses origines.

Une surprise m’attendait dans un des numéros du Bédard : Une des filles d’Alphonse et d’Euphémie, restée à Argyle, et qui s’appelait Alma, se maria avec un certain Barthelemy Bedard. Une de leurs filles, religieuse et encore de ce monde, s’appelle … Édith Bédard! J’ai même pu voir une photo d’elle, reproduite dans le numéro de l’été 2001 (série de photos non paginées, à la fin du numéro).

L’exil d’Isaac Bédard revisité par ses descendants d’Argyle et de Charlesbourg. Les Bédard américains s’intéressent également beaucoup au premier Bédard d’Amérique, l’ancêtre Isaac. Donc à ce qui se passa avant la Nouvelle-France. Ils publient un long article signé par un « cousin » de Charlesbourg, Isidore Bédard, qui a mené des recherches à Charlesbourg, mais également en France, à La Rochelle sur le sujet.

La version d’Isidore Bédard, de Charlesbourg. Isidore livre un portrait qui est une sorte de reconstitution imaginée de ce qui aurait motivé Isaac Bédard dans sa décision de fuir La Rochelle. Il s’est imprégné des récits des massacres de huguenots par les catholiques. Il essaye d’imaginer pour nous et avec nous ce qui amena Isaac à abjurer la foi protestante et à décider de s’expatrier en Amérique. Pour lui, il n’est pas exclu qu’Isaac soit éternellement demeuré un huguenot convaincu, même après son abjuration et ses derniers propos, sur son lit de mort. Et que c’est pour protéger ses enfants qu’il décida ultimement de s’expatrier : « Isaac travaille aux chantiers maritimes de La Rochelle et l’aîné des garçons, Jacques fait de même, comme charpentier. De nouveau, les extrémistes catholiques redoublent d’ardeur dans la poursuite de ceux qui n’ont pas abdiquer (sic) le Calvinisme. À leur fureur, Jacques, 15 ans, n’y échappe pas, il est fait prisonnier pour être rester(sic) fidèle à sa foi. Le bûcher l’attend. Nous sommes en 1659, Isaac ayant perdu ses fils François, Pierre, Richard et Isaac junior dans la tourmente sans que nous sachions le sort qu’ils ont subi.

C’est très facile de dire qu’ils sont morts en bas âge, mais cette assertion est une manière de se défiler et de laisser le temps faire son œuvre d’absence de punition.

Isaac est embrouillé par la disparition de ses fils et par Jacques qui est en prison. Il ne lui reste plus que deux fils Jacques et Louis, 4 ans, ainsi que son épouse Marie Girard. Tous ces malheurs s’abattent sur lui, telle une meute de chiens enragés sur leurs proies. Il n’y a plus de rémission pour Isaac, ses deux fils et son épouse. Il doit prendre une décision rapide et primordiale pour leur avenir. Il est religieux dans l’Âme, résistant depuis 31 ans aux pressions des tortionnaires catholiques de sa ville pour qu’il devienne un adepte de l’Église de Rome. Pour cacher leur erreur et gagner par ruse, les autorités lui suggérèrent l’exil au Kébec. C’est digne de Machiavel. De cette façon, Isaac pouvait sauver ce qui lui restait de sa famille. (…).

Isaac n’avait plus les moyens de résister encore, il devait devenir catholique romain. Tout tournait dans sa tête; j’ai 46 ans, que vais-je faire en Amérique? Je ne suis pas un travailleur de la terre, car je ne connais rien en agriculture. » (Op. cit., été 2001, non paginé).

Le risque d’interprétation… Le récit continue ainsi sur plusieurs pages. L’auteur va jusqu’à invoquer le découragement pour justifier les démêlés qu’Isaac eut avec ses voisins et les autorités, au début de son implantation en Nouvelle-France. On va trop loin dans la spéculation et la reconstitution historique. Car, au fonds, on sait si peu… La tentation d’imaginer ce qui a pu arriver à tel ancêtre est forte… mais ce n’est pas sans risques. On se met peut-être à échafauder alors un passé, qui n’a jamais existé. Mais, quoi qu’il en soit, la démarche est touchante.

D’imaginer de plus que Jacques, le propre fils d’Isaac Bédard, une fois installé à Charlesbourg, deviendra marguillier de l’église de Charlesbourg, ajoute à la confusion (voir chapitre 57 Les racines huguenotes des Bédard)… Et nous ramène à la juste réalité : il s’agissait de survivre, de passer à autre chose et non de regarder en arrière.

Ce qui en est resté dans ma mémoire. Je me souviens que mon père parlait d’un de ses oncles qui avait vécu un certain temps aux États-Unis et qui en était revenu avec un accent anglais qu’il n’abandonna ensuite jamais. La chose le faisait sourire car, m’avoua-t-il, cela lui semblait manquer de naturel! S’agissait-il de l’oncle Alphonse?

En écrivant ces lignes sur des êtres, oncles et tantes de mon père, et leur importante progéniture, je réalise que lorsque je suis née en 1948 sa famille élargie comptait nombre d’individus encore établis à Charlesbourg. C’était, vraiment, un clan très étendu. Les branches en étaient nombreuses, volumineuses sous le poids des naissances, exactement comme cet orme majestueux qui trônait au bout de la terre de ma grand-mère et que papa me désignait souvent comme un modèle de persévérance.

6501aQualifié de « Géant de Charlesbourg », cet orme était selon la légende populaire le plus vieil arbre de la province de Québec. Il dut être abattu le 11 juillet 1973 par le nouvel acquéreur de la partie nord-ouest de la terre familiale à qui mes tantes Élizabeth et Thérèse avaient vendu une portion de leur terre, située à l’extrémité ouest de leur propriété, à la hauteur de la 66e rue. L’arbre était malade et rendait impossible toute excavation autour de son périmètre.

La disparition du « plus vieux et du plus honorable résident « fit l’objet d’un article dans le bulletin La Vie, de Charlesbourg.

Un regret profond… Je me souviens des noms de famille, Verret, Villeneuve, Martel, Lefebvre,Trudel, Audy, Pageot, Auclair, mentionnés fréquemment dans les conversations Mais je ne pense pas que nous ayons beaucoup entretenu de liens avec eux. Je n’ai aucun souvenir d’une soirée chez mes parents où les convives auraient été des habitants de Charlesbourg, voisins ou cousins. Il ne me semble pas que notre maison, pourtant assez majestueuse et dont mon père semblait fier, s’ouvrit jamais pour accueillir des membres de cette fratrie élargie.

La faute en revint sans doute à ma mère, qui n’apprécia jamais les Bédard, non plus que le village pourtant chargé d’histoire de Charlesbourg. Pourtant, à bien y penser, mon père devait connaître par leurs noms les habitants de chacune des maisons de la première avenue, qui menait à l’église. Quant à ceux du Trait-Carré, la chose allait de soi! 

Heureusement, la mémoire vive de nos ancêtres continue d’être portée par leurs descendants.

66 - Cléophas Bédard, sacristain de l'église de Charlesbourg

 

 

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