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21 – Urbain Bédard et la photographie

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Mon père aura été, pendant ses années de jeunesse et jusqu’après ma naissance, grand amateur de photographie.

J’en ai pour preuve les nombreux négatifs, ainsi que les photos développées, voire retouchées, qui témoignent du plaisir qu’il prenait à se consacrer à la photo. Et que j’ai en ma possession (voir au bas de cette page).

2100cLe vieux Kodak a survécu au passage du temps. Papa avait fait l’acquisition d’un appareil photo probablement dans les années 1929. Un Brownie no 2 A produit à large échelle à Toronto par Eastman Kodak. Il ne coûtait que $2.50. Simple à souhait et en même temps très fiable. Le voici, cet appareil photo, dans tout son dépouillement. Objet éminemment manuel et tactile. À des années lumière de l’électronique telle que nous la connaissons aujourd’hui.

Toucher cet objet poussiéreux, l’examiner, nous fait réaliser combien l’art de fixer sur une pellicule une scène, un visage, un paysage, à travers un objectif, constituait alors une opération rudimentaire et pleine de promesses en même temps.

Un amour de jeunesse. En 1929, Urbain était fiancé à celle qui allait devenir sa première femme, Louisette Desjardins. Les deux s’étaient connus à l’hôpital Saint-Michel-Archange, où elle travaillait comme infirmière et où mon père avait fait un stage, dans le cadre de ses études en médecine. Il songea pendant un temps à se spécialiser en psychiatrie, mais opta plutôt pour l’immunologie. Louisette sera le grand amour de sa vie. Il l’épousera  le 31 août 1931. Elle décédera le 19 septembre 1943 après lui avoir donné quatre enfants. Un drame absolu dans l’existence de mon père.

2104Les photos qu’il a prises d’elle alors qu’ils sont fiancés, sont nombreuses. On la devine chaleureuse à l’extrême, rieuse et insouciante. Des photos où elle pose seule, une femme enveloppée comme il les aimait, portant de beaux ensembles. Ou des photos de groupe, entre copains. Sa sœur, dont je ne connais pas le prénom, avait épousé un notaire, du nom de Michaud, qui apparaît sur de nombreuses photos. Camaraderie et joie de vivre.

Sensualité d’alors. Puis, des photos de Louisette en maillot de bain, les cheveux détachés, langoureusement étendue sur ce qui semble être un toit de maison. Le tout ne correspond certes pas aux canons de  beauté d’aujourd’hui. L’intensité du moment, elle, est bien présente. Elle l’aimait et il l’aimait. Après la naissance de leurs enfants, avec un bonheur conjugal intact, il prendra de nombreuses photos des enfants du couple. Il saura saisir le caractère de l’un et de l’autre de ses petits chéris, immortaliser l’instant.  Les regards sont souvent intenses et appuyés.

Enfin, des paysages, qu’il a croqués, au gré de leurs escapades et de leur séjour à Toronto, juste après leur mariage. La plupart ont été souvent retouchés, délicatement. De petits formats. Sujets intéressants. Il notera de son écriture fine, souvent à peu près indéchiffrable, le lieu et le moment.

Un besoin impératif de bonheur. L’œil d’Urbain Bédard, photographe, son cœur devrait-on dire, transparaît dans toute photo qu’il prend. Une lecture photographique émotive qui captait les ondes. Une existence illuminée par de grands bonheurs… Et transpercée par de grands malheurs…

Une précision s’impose, qui nous révèle un trait important de sa personnalité: C’était un hyper-sensible, qui prenait des photos des êtres qui lui étaient chers uniquement quand il était heureux. Son bonheur passait par les femmes. Entendre : quand il aimait et qu’on l’aimait en contrepartie. Quand le bonheur n’était pas au rendez-vous, il fermait boutique.

Un indicateur des périodes de sa vie où il fut bien dans sa peau et de celles où il vécut de difficiles épreuves.

Outre la période Louisette Desjardins, il se consumera d’une passion que je qualifierai de significative, quoique moindre, pour ma mère, qu’il connut quelque dix-huit mois après la mort de Louisette. Porté par l’amour qu’il portait à ma mère, et qui s’étendit jusqu’à moi, la petite, symbole d’un bonheur retrouvé, il prendra de nombreuses photos de l’une et de l’autre. Toutes les photos de ma petite-enfance sont l’œuvre de mon papa.

Mais le bonheur partagé entre Marcelle et Urbain sera de courte durée. Quand j’aurai environ quatre ans, il rangera l’appareil photo dans un placard… d’où je l’ai sorti quand j’ai vidé la maison de ma mère. Il n’y avait plus jamais touché.

22 – Marcelle, qui s'y frotte s'y pique!

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