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132 – Patrick Gilroy, propriétaire d’esclaves

(Patrick Gilroy 1 de 2)

L’après Nathalie Dorion … Qu’advint-il du Dr John P. Gilroy? On ignore quand et comment il réussit à se débarrasser de Nathalie Dorion, son encombrante épouse de Québec, qui avait sûrement réussi à établir le fait qu’ils étaient bel et bien mari et femme puisque cela était irréfutable. Force est de reconnaître que l’obstination qu’il mit à nier la réalité était vaine. En corollaire son entêtement, à elle, à poursuivre un homme qu’elle déclarait en même temps abhorrer avait de quoi étonner. Plus elle s’acharnait à gagner son point, plus son image de femme honorable se ternissait. À la limite on peut s’interroger sur son équilibre mental. Était-elle instable au plan psychique? Elle traînait un bagage génétique peu commun, puisque son père, Pierre Dorion, avait passé les sept dernières années de sa vie interné (voir chapitre 114 L’internement de Pierre Dorion).

…reconstitué grâce à ses descendants américains. Patrick Gilroy tourna complètement la page et occulta complètement son passé. En fait, il se refit une nouvelle vie. Comme si rien de ce qui s’était passé à Québec n’était arrivé. Sa nouvelle existence a été amplement documentée par ses descendants américains. J’ai pu échanger de l’information au cours des dernières années avec deux d’entre eux : Betty Gilroy-Lawson et Tom Gilroy, tous deux arrière-arrière-arrière- petits enfants de Patrick Gilroy. C’est Tom Gilroy qui m’a fourni la retranscription des articles incendiaires parus dans le Daily National Intelligencer (voir chapitre 131 La saga Dorion-Gilroy).

Patrick Gilroy acquiert une plantation de tabac … Patrick Gilroy mènera aux États-Unis une existence qui, prise au premier niveau, semblait assez exemplaire. Il pratique la médecine à Washington en 1826 et 1827, si on se fie aux annonces qu’il fait paraître à plusieurs reprises dans The United States Telegraph et dans The Daily National Intelligencer.

Puis il se déplace vers le Maryland dans les années 1828 et y fait l’acquisition d’une plantation de tabac, de 127 acres, dans la localité de Nanjemoy, dans le Charles County. Il s’agit d’une zone, encore rurale aujourd’hui, bornée par la rivière Nanjemoy qui est un affluent du Potomac, située à environ quarante kilomètres au sud de Washington. Les vestiges de sa plantation y existeraient toujours, à l’intersection de Gilroy et Bowie Road, selon le récit d’une de ses descendantes.

… et fonde une famille. Patrick Gilroy a une conjointe, Henrietta Doyle, plus jeune que lui d’une dizaine d’années. Une première mention le concernant apparaît dans le recensement de 1830 du district de Durham, Charles County. On le décrit comme ayant entre 30 et 40 ans, ce qui est assez vague comme information, et célibataire. Aucune mention de sa profession de médecin. Puis, lors du recensement de 1840, il est identifié comme le Dr John P. Gilroy, ayant entre 40 et 50 ans. Il déclare toujours vivre avec Henrietta Doyle, âgée entre 20 et 30 ans. Ils ont un fils, Charles-Edward, âgé entre 2 et 3 ans.

13202aPropriétaire d’esclaves. On indique également dans le recensement de 1840 qu’il possède des esclaves : un homme, âgé de 10 à 24 ans, une femme, dans le même groupe d’âge, et une fillette, âgée de moins de 10 ans. Posséder des esclaves et les déclarer comme un actif nous apparaît étonnant, vu sous la lorgnette qui est la nôtre. À cette époque, c’est grâce à cette main-d’œuvre humaine, sans droits aucuns, traitée à peine comme des animaux et sur laquelle ils ont droit de vie et de mort, que les propriétaires de plantations font fonctionner leur entreprise … 

Dix ans plus tard, lors du recensement de 1850, on mentionne qu’il est John Gilderoy, médecin, âgé de 50 ans, né en Irlande. L’orthographe de son nom (Guilderoy au lieu de Gilroy) est sans doute attribuable au recenseur qui l’a incorrectement noté. Il qualifie désormais sa conjointe, Henrietta, d’épouse. Elle est âgée de 36 ans et serait née au Maryland. Ils ont alors trois enfants déclarés : Charles, âgé de 11 ans, John F. âgé de 9 ans et Thomas, âgé de 4 ans. Exerce-t-il la médecine ou se contente-t-il d’être propriétaire de plantation? Impossible de le dire.

Mais où est passé le docteur Gilroy? Au recensement de 1860, changement de situation. Le relevé indique que c’est Henrietta, âgée de 46 ans, qui se déclare désormais chef de famille. Elle vit toujours à Nanjemoy avec ses quatre enfants : Charles, âgé de 21 ans, John F. âgé de 18 ans, Thomas, âgé de 15 ans et Mary V., âgée de 10 ans. Mais pas sur la plantation, car Patrick Gilroy l’a vendue en 1859, après avoir placé une annonce à cet effet dans le Port Tobacco Times du 13 mars 1956. Comment subvient-elle à ses besoins et à ceux de sa famille? Mystère.

Qu’en est-il de Patrick Gilroy? Il vit désormais à Washington. Selon le même recensement de 1860, il est identifié comme ayant 63 ans, médecin, habitant le domicile de Francis R. May, âgé de 65 ans, qui est surveillant (watchman ) au Département des Finances (Treasury Department), lequel est marié à Charlotte, âgée de 55 ans. Ils ont deux fils : Francis R., âgé de 17 ans et William, âgé de 15 ans. Également locataires chez Mr et Mrs May : Martha A. Pierce, âgée de 33 ans, modiste, ainsi que son fils de 17 ans, Ignasius, apprenti-chapelier.

Que fait le docteur Gilroy à Washington? Pratique-t-il toujours la médecine? Si tel est le cas, comment se fait-il qu’il soit locataire, et même chambreur, chez des gens dont le niveau social semble inférieur au sien? La chose a de quoi étonner, d’autant qu’il a indiqué au recenseur disposer de biens immobiliers d’une valeur de deux-mille dollars, une somme appréciable pour l’époque. A-t-il carrément abandonné sa femme et ses enfants? Martha A. Pierce est-elle liée à lui?

Décès en octobre 1861. Patrick Gilroy meurt en octobre 1861, au moment même où les États-Unis basculent dans la sanglante guerre civile (1861-1865) qui déchirera le pays. Au cœur de cet affrontement  qui fera 620 000 morts parmi les militaires, sans compter les victimes civiles qui se compteront par centaines de milliers, on retrouve la volonté du président Abraham Lincoln d’accorder la liberté pleine et entière aux esclaves.

Patrick Gilroy décède à l’hôpital Providence de Washington, tenu par les Sœurs de la Charité, qui vient d’ouvrir ses portes. Il semble que ni sa femme ni ses enfants n’aient été présents à son chevet, non plus qu’à ses funérailles. La cause de son décès n’est pas connue. Mais on sait que cet hôpital ne traitait pas les maladies contagieuses et se spécialisait dans le traitement des maladies chroniques, incluant les maladies mentales et vénériennes. Il en coûtait quatre dollars par semaine pour y être soigné et logé.

On ignore où Patrick Gilroy fut inhumé. Un fait troublant n’a cessé d’intriguer ses descendants : Patrick Gilroy avait rédigé un testament dans lequel une provision pour son enterrement avait été prévue. Or personne parmi ses descendants n’a pu déterminer où son corps était enterré! Également, dans son testament, il identifiait un certain David Gilroy, résident de la Pennsylvanie, comme son exécuteur testamentaire. Aucun descendant Gilroy n’a pu déterminer qui était ce David! Un neveu, peut-être?

Tout ce que l’on sait c’est qu’un David Gilroy régla effectivement la succession, sans que ses descendants immédiats, qui habitaient tous Nanjemoy ou les agglomérations avoisinantes, n’aient été partie prenante de l’inhumation non plus que du règlement de sa succession, dont le solde final se limitait à quelques dollars.

Son corps ne fut donc jamais rapatrié à Nanjemoy. Il disparut comme il avait vécu : dans l’ambiguïté.

Consultez l’arbre généalogique des Dorion
Consultez le tableau des descendants de Pierre Dorion et de Jane Clarke
133 - Patrick Gilroy, des descendants stupéfaits

 

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